Tom Rob Smith : Enfant 44
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J'ai choisi de vous parler de ce roman, Enfant 44 de Tom Rob Smith, parce qu'il m'a beaucoup marquée. Ce roman, très récent (2009), est le premier roman que je lis dont le cadre spatio-temporel se situe dans la Russie stalinienne des années 50. Ayant peu lu et étudié cette époque, j'ai trouvé dans ce livre de nombreuses informations liées à cette période historique.
Mais attention, ce roman est avant tout un thriller policier haletant. Le personnage principal, Leo – agent du MGB – est chargé d'une enquête, qu'il devine criminelle. Or, en Russie soviétique, le crime n'existe pas ! Ce pays est absolument parfait pour les hauts dirigeants ! Comment peut-on supposer qu'un tueur en série vive en cette patrie ! Leo va devoir surmonter de nombreuses embûches avant de trouver toutes les réponses.
Tom Rob Smith allie parfaitement ici le genre policier au genre historique. Bien que l'enquête soit au premier plan, le livre informe par ses détails historiques sur les pratiques de la police d'Etat, la propagande inculquée à l'école, l'impossibilité de ne pas aimer et croire en son gouvernement.
A la fin de son roman, l'écrivain renseigne une bibliographie qui lui a permis de dresser le décor de son intrigue avec tant d'exactitude, et bien qu'il s'agisse d'un roman, la trame historique me semble d'un réalisme indéniable. L'écrivain a cherché, épluché, analysé les ouvrages nécessaires pour faire de son oeuvre ce que j'appellerai volontiers un roman historique.
Le personnage de Leo est lui aussi très étudié, complexe et d'un intérêt formidable. L'homme n'est pas un communiste né, mais un idéaliste. Rêveur, il croit en son pays, ou du moins espère que le gouvernement a fait le bon choix. Leo n'est pas violent, accusateur, ni hypocrite. Il ressemble davantage à un homme optimiste – ou naïf ? - qui fait ce qu'on lui demande parce qu'il pense que c'est de cette façon que le pays peut bien se porter. Il ne faut cependant pas croire qu'il est naïf : les fausses accusations, les arrestations insensées ne le laissent pas de marbre, il a conscience de certains abus, mais supposent que s'il en est ainsi, c'est qu'il doit y avoir une bonne raison. Agent du MGB – police d'Etat chargé du contre-espionnage – sa personnalité apparaît en décalage avec son emploi. Dans l'imaginaire collectif, ces policiers se dessinent à nous comme violents, sans pitié, avide de sang. Leo n'en fait pas parti et c'est bien là sa différence avec ses collègues que l'on croisera dans l'oeuvre.
Sa femme, Raïssa, est elle aussi une personnalité intéressante. Professeur, elle a conscience de la propagande qu'elle est obligée de véhiculer. Contrairement à son mari, elle ne se fait pas d'illusion mais doit rester prudente. Ses doutes quant aux pratiques gouvernementales sont dangereux. Accusée de trahison, Leo prendra cependant sa défense....
Ainsi, Enfant 44 plaira à ceux qui aiment les romans policiers, mais également à tous ceux qui veulent se représenter avec plus de précision la société stalinienne. Je ne suis pas une grande lectrice de romans policiers, mais celui-ci m'a tenue en haleine véritablement !
Enfant 44, de Tom Rob Smith, Pocket, 2009, 519 pages.
